Wanaka, Queenstown : les couleurs de l'automne
Samedi 2 mai, après un trajet de bus d'environ 5h, je m'arrêtais à Wanaka. Tirza et Susanna, elles, remontèrent dans le bus après m'avoir serrée dans leurs bras pour me dire "Au revoir". Ca y est, j'y étais : je poursuivais l'aventure seule. Mais pas vraiment pour le moment, car je devais retrouver Sophie que je n'avais pas vue depuis trois mois et qui, par le plus grand des hasards, était à Wanaka ce jour-là et avait booké dans la même auberge. Quelque chose se dit entre les voyageurs de Nouvelle-Zélande, il paraitrait que l'on rencontre toujours les gens au moins deux fois au cours de notre voyage. J'en ai fait l'expérience et curieusement, c'était (presque) toujours par hasard.
Je savais que cette semaine allait être très chargée : j'avais prévu de rester deux jours à Wanaka, puis de descendre à Queenstown pendant cinq jours. Pendant ces cinq jours, je voulais faire la croisière dans les Milford Sound, considérés comme le plus bel endroit du pays. Et le dimanche 10 mai, j'avais prévu de prendre le bus de Queenstown à Dunedin. Un sacré parcours m'attendait.
Wanaka : petite ville au charme envoûtant
Wanaka dégage vraiment quelque chose de particulier : le temps semble y être absent, comme suspendu. Je m'y suis tout de suite sentie bien, sereine. Le lendemain de mon arrivée, nous avons marché avec Sophie au bord du lac pendant quelques heures. Le soleil d'automne rendait les paysages somptueux, l'atmosphère plus que fraiche me saisissait, les couleurs et les odeurs de feuilles tombées des arbres me firent retomber en enfance, dans la cour de récréation de l'école primaire. Et je me suis rappelée avoir plus d'une fois inspiré profondément, gorgeant mes poumons de ces senteurs automnales qui m'apportaient un sentiment de sécurité. "Pas étonnant que l'on travaille avec les odeurs sur les gens amnésiques", pensais-je. Le pouvoir des odeurs est tellement puissant..
Une rencontre inattendue
Lorsque Sophie reprit sa route après cette balade, je rentrais à l'auberge, décidée à faire une coupure et à m'accorder du temps toute seule (chose qu'il est difficile de faire lorsque l'on vit en communauté 24h/24). Je pris ma douche et rentrai à nouveau dans ma chambre, où deux Allemands - une fille et un garçon - parlaient entre eux. Cela m'irrita et je me mis immédiatement dans ma bulle de défense : ce petit rien était TROP pour moi.
Les Allemands en Nouvelle-Zélande sont tellement nombreux qu'il est parfois plus fréquent d'entendre parler allemand que d'entendre parler anglais. Et lorsqu'ils sont en groupe, il est impossible de s'intégrer car ils s'expriment dans leur langue maternelle et ne font aucun effort de courtoisie. La règle implicite lorsqu'on voyage, c'est de ne pas parler dans sa langue maternelle si au moins une personne dans la pièce ne la comprend pas, par respect. Il est facile de prendre sur soi les premiers temps, mais au bout de 8 mois, le simple fait d'arriver quelque part et d'entendre de l'allemand devient une agression et une certitude de se sentir exclu.
"OK, encore deux jeunes Allemands qui parlent entre eux dans la chambre alors qu'une non-germanophone est dans la pièce, sympa. Allez, je vais dans mon lit, je lance "Governor of Poker 2" sur l'ordi et je fais l'asociale TOUTE la soirée", me dis-je. Je n'étais pas installée deux minutes sur mon lit que l'Allemande s'adressa à moi et me posa une question. Je descendis du lit superposé et me mis à regarder avec elle sa carte routière. La conversation était engagée et je ne sais pas comment cela arriva, mais nous en vînmes à parler de diététique, de méditation (elle avait fait une retraite méditative en Asie), de végétarisme, de lithothérapie (elle portait à son poignet de nombreux bracelets en pierre), de voyage, de spitirualité... Je lui montrais ensuite de nombreuses photos de mon voyage en Nouvelle-Zélande, le couteau que j'avais fabriqué...
A la fin de notre discussion, elle me dit : "Tu n'as pas faim ? Quelle heure est-il ?". "Ho ! Il est 21h ! On parle depuis 3h !, lui répondis-je, au fait comment t'appelles-tu ?" - Oui, on parle à tellement de gens partout où l'on va que l'on ne demande plus systématiquement les prénoms... "Christin", me dit-elle. C'est donc en partant sur un très gros a priori que je fis finalement la connaissance de Christin. Et ma surprise n'allait pas s'arrêter là.
A table, notre conversation se poursuivit et nous arrivâmes à parler de nos études. Christin me demanda avec un air à la fois curieux et étonné : "Mais, Amélie, quel âge as-tu ?". Je souris, puis, comme à chaque fois que l'on me pose cette question, je commençais à lui donner des indices pour qu'elle devine par elle-même : je lui énumérais l'âge de mes neveux, l'âge de mes frères et depuis combien de temps j'avais terminé l'université. Lorsqu'elle su mon âge, elle fut surprise : "Quoi ? Mais Amélie, je pensais que tu avais une vingtaine d'années !" - Et là tu fais la prière des 4 "je-fais-bien" : Je fais bien de ne pas fumer ; Je fais bien de ne pas trop boire ; Je fais bien de me coucher tôt et de dormir entre 8 et 9h par nuit ; Je fais bien de faire attention à ce que je mange. Je lui retournais la question et quelle ne fut pas ma suprise lorsqu'elle m'annonça qu'elle avait, non pas 20 ans comme je le pensais, mais 30 ! Nous nous étions finalement surprises mutuellement, certainement trop habituées à rencontrer des jeunes voyageurs de 18 ans.
Le lendemain, Christin et moi avions décidé de partir en randonnée sur le Mont Roys Peak juste avant que je prenne mon bus en direction de Queenstown. Mon départ était prévu à 16h30 et la randonnée durait approximativement 5h-5h30. Il n'y avait donc pas de temps à perdre d'autant plus qu'il fallait gérer les aléas du transport, aller comme retour et prendre en compte le fait que je devais repasser à mon auberge pour prendre mes affaires. Intérieurement, je m'interrogeais sur la possibilité de cette journée car le programme était pour ainsi dire CHARGE. Au final, comme une étoile de chance au-dessus de nos têtes, nous avons non seulement atteint le sommet avec Christin à 12h30, profité de la vue, trouvé un moyen de transport pour le retour et pris le temps de manger avant que je prenne le bus. Je nous trouvais déjà particulièrement chanceuses d'avoir eu le temps de tout faire, jusqu'au moment où j'appris qu'un tremblement de terre avait eu lieu à Wanaka et Queenstown au moment où nous étions sur la route du retour (probablement pour cela que je ne l'ai pas senti, je ne sais pas). Ce qui signifiait que s'il avait eu lieu 2h avant, nous l'aurions senti sur le sommet du Roys Peak... alors que nous étions sur un chemin étroit, destabilisées par le vent... Merci la chance ;-).
Queenstown : une ville très touristique
Christin m'accompagna à mon arrêt de bus direction Queenstown. Même si nous venions de nous rencontrer, nous séparer nous fit un pincement au coeur. Je lui donnais mon parcours ainsi que les noms de mes auberges pour les 15 prochains jours, si jamais elle comptait me retrouver au cours de son voyage.
Deux heures de bus plus tard, j'arrivais à Queenstown alors qu'il faisait déjà nuit (et froid). Il me fallait trouver mon auberge, que je savais un peu excentrée du centre-ville. Comme je m'en doutais, avec mes 5h de randonnée dans les jambes + les deux heures de bus + mon petit sac à dos de 7 kilos, l'ordinateur, le sac de nourriture ET mon sac à dos Franklin d'au moins 18 kilos, le chemin s'avéra compliqué. Ce que je n'avais pas prévu : la forte inclinaison des routes jusqu'à mon hôtel. J'hésitais entre l'envie de pleurer, l'envie de poser toutes mes affaires et de dormir dans la rue et l'envie de continuer. Après 20 minutes, j'arrivais au "Butterfly Lodge" ("La Loge Papillon") en pensant : "Amélie, n'oublie pas, avec l'auberge excentrée, tu évites les jeunes Allemands bourrés" (Où ça, un préjugé ?). Je pris possession de mes clés et une fois dans ma chambre, je posais mes affaires dans un soupir de soulagement et m'allongeais sur mon lit (oui, j'ai pris une douche après, ça va !).
Le lendemain, lorsque je vis la belle journée qui s'annonçait, je saisis l'occasion et sortis profiter du soleil pour prendre des photos de la ville (en Nouvelle-Zélande, quand le soleil est là tu en profites car tu ne sais jamais quand il réapparaitra !). Je ne fus pas déçue : pour mon arrivée, Queenstown avait revêtu ses plus belles couleurs d'automne...
Après mon escapade matinale et comme il commençait à faire un peu faim dans mon estomac, je franchis les portes d'un restaurant japonais et j'osais commander un chirashi, assise seule à ma table. Une grande première que ce restaurant toute seule. Merci mon appareil photo pour m'avoir donné une contenance. Ce chirashi fut de loin le meilleur que je n'ai jamais mangé ! Il était si frais, le poisson fondait en bouche ! Bénit-soit-celui-qui-mit-ce-restaurant-sur-ma-route. Le ventre bien remplit, je terminais ma journée sur une note de shopping avant de rentrer à l'auberge. Finalement, j'avais bien fait de profiter de cette journée ensoleillée, car les cinq jours qui ont suivi ont été rythmés par de fortes averses.
Des activités originales !
Si j'avais booké autant de jours à Queenstown, c'est parce que j'avais en tête de faire plusieurs activités : la ville étant une ville jeune et touristique, on peut trouver bon nombre d'opportunités pour se divertir. Je ne pouvais pas tout faire, bien sûr... j'avais donc opté pour ce qui me faisait le plus vibrer (et à un très bon prix, merci bookme.co.nz !) à savoir : un pack de deux séances de films en 4D au XD Theatre (avec les lunettes 3D, les sièges qui bougent, les ventilateurs pour les sensations et tout ! J'ai choisi sur les conseils de l'hôtesse les films "Canyon Coaster" qui se passe en Amérique de l'Ouest à bord d'un train dans une mine et "Ravine Racer", une course de voitures volantes dans le désert : mon préféré en termes de sensations !), les droits d'entrée + une boisson au Below Zero Ice Bar (un bar à - 10°C fait entièrement de glace : deux sculpteurs viennent tous les trois mois et mettent 4 jours à réaliser les oeuvres) et une journée croisière dans les Milford Sound avec transport compris.
Malheureusement, la croisière me laissa un petit goût amer. Les Milford Sound étant considérés comme l'un des plus beaux endroits du pays, je m'attendais à vibrer. C'est très joli, j'en conviens : nombre de chutes d'eau gigantesques sortent des montagnes, c'est somptueux... immense... et j'irais jusqu'à dire que c'est aussi très austère (la puissance de la Nature qui te dit de passer ton chemin, pauvre petit mortel ! C'est du moins comme cela que je l'ai ressenti, ce qui n'aurait surement pas été le cas avec du soleil). Pendant cette journée, je ne fus vraiment pas gâtée avec le temps (et quand je dis pas gâtée, je veux dire que lorsque tu sors 5 secondes tu es trempé jusqu'aux os et ce, à chaque stop-photo du bus, quant à la croisière, obligé de prendre des photos de l'intérieur du bateau à cause de la pluie trop violente sur le pont), le paysage était du coup très nuageux et l'atmosphère, en plus d'être humide était très froide. De la croisière, je ramène en souvenir, non pas de belles photos mais des maux de gorge et une quinte de toux qui dure depuis 10 jours :). Mais comme diraient les joueurs de loto : "C'est le jeu ma pauv' Lucette !".
Après avoir fait toutes ces activités, il me restait deux jours avant ma prochaine destination pour me remettre de mes émotions. Et, à ma plus grande joie, le lendemain de la croisière, je reçus un mail de Christin qui m'annonçait qu'elle allait arriver à Queenstown et que nous pourrions nous voir. Finalement, nos routes se croisaient à nouveau !
Dunedin : le temps du choix ?
Dimanche 10 mai, je quittais Queenstown pour me rendre à Dunedin, la première ville située sur la côte Est. J'étais attendue au "Manor House Backpackers" pour un helpX de 15 jours : le temps pour moi de réfléchir à ce que je voulais faire après. Devais-je m'établir à Dunedin pour plusieurs semaines et tenter de rechercher un emploi comme je l'avais fait à Taupo ? Devais-je poursuivre mon chemin et remonter vers le Nord ? Mais où ? Plusieurs questions tournaient en boucle dans ma tête et je n'avais pas les réponses. J'étais fatiguée par toute la route que j'avais faite cette semaine et un peu perdue. Ma seule certitude était que j'avais un toit au-dessus de la tête pour les deux prochaines semaines. Confuse, je décidais d'attendre, dans l'espoir de me réveiller un matin en sachant quelle décision prendre.